L'automobile est désormais bien implantée en Alsace. Dans la foulée, avec un nombre de véhicules en circulation qui augmente, des commerces comme les garages, une auto-école et des stations d'essences se créent. Et, on commence à parler d'un certain ... Ettore BUGATTI. Revue de presse. 

Les faits d'actualités automobiles

1903

A vendre automobile 800 Mark, Garage automobile à Strasbourg, 33 rue Kageneck

1904

En 1904, le plus grand garage de Strasbourg se trouve au faubourg de Saverne n°17. 80 véhicules à vendre, pièces de rechange, carburant et huiles, pneus, ouvert 24 heures sur 24.

1905

Le sous-secrétaire des finances et des métiers von Schrandt écrit le 23 juin 1905 : « C'est à une vitesse vertigineuse que se multiplie le nombre de véhicules à moteurs en Alsace. Lors du recensement du 13 octobre 1903, ils étaient encore à peine 130 en circulation. Nous devons réfléchir sérieusement à instaurer une formation et des autorisations spéciales pour les nouveaux conducteurs, à classer davantage les nouveaux genres de véhicules comme les omnibus à moteurs ou les véhicules de plus en plus lourds et à sévir davantage contre les automobiles non déclarées ».

1906

En 1906, le Bezikspräsident Elsass Lothringen (Président de la région Alsace Lorraine) envoie une lettre au Kreisschuhlinspektor (Inspecteur d'académie) suite à la plainte de l'Automobile Club d'Alsace et de son président Léon Schlumberger. Le document dévoile les sentiments récalcitrants de la population à l'encontre de l'automobile (Motorfahrzeuge, machines à moteur). Le président rapporte que certains habitants bombardent les véhicules avec du fumier, des excréments, des cailloux et autres projectiles. On sème des clous, des tessons de bouteilles, barricade les routes de pierres et une grande hostilité se manifeste à l'encontre des conducteurs jusqu'à atteindre au péril de leur vie. Il conseille aux enseignants d'expliquer aux enfants, et dans la foulée à leurs parents, que la voiture est l'invention du siècle, qu'elle permet d'atteindre des endroits isolés et qu'elle contribuera à la prospérité économique du pays.

« Was der Bür net kannt, fresster net » (« Ce que le paysan ne connaît pas, il ne le mange pas », proverbe alsacien). Plus tard, l'Alsace, au centre du grand creuset du berceau automobile régional et international, tiendra une place importante dans l'histoire automobile. Bientôt l'administration devra aborder le sujet des assurances automobiles. De plus en plus de conducteurs responsables d'accidents de la route sont tentés de se soustraire à leurs responsabilités et de filer en douce. De toute façon qui pourrait les rattraper ? 

Lettre de 1906 de Léon SCHLUMBERGER, Président de l'Automobile club d'Alsace Lorraine, à l'attention du Président de Région pour inviter l'administration l'Éducation Nationale à accepter des journées d'informations des instituteurs à l'attention des élèves et leurs parents au sujet du bienfait des automobiles (archives départementales du Bas-Rhin)

Auto-école

La première auto-école du Bas-Rhin, déjà avant 1910, avait son siège au 1, Faubourg de Pierre à Strasbourg. George KRANNER était assermenté et expert auprès des tribunaux. Kranner possédait une Bentz 3 cv qui s'illustra lors de la course de 1900 à Strasbourg [ à lire dans : La genèse de l'automobile en Alsace (partie 2)].

La saga Bugatti 

Ettore BUGATTI sur la De Dietrich Bugatti de 1903

23 mai 1903

Illkirch Graffenstaden (communiquer de presse) : L'usine de métallurgie d'ici (SACM) travaille à plein régime. De nombreuses heures de travail supplémentaires sont nécessaires, surtout dans la branche des locomotives et des machines-outils. Récemment est entré une nouvelle commande : celle de l'automobile, d'après un brevet de l'inventeur BUGATTI (le journaliste a écrit « BUCCATI » ...) qui surveille personnellement la production. On a déjà construit 2 voitures de courses et Bugatti est parti lui-même à Paris pour participer à la course Paris-Madrid qui aura lieu le 24 mai. La voiture monte à 140 km/h et comptabilise 60 cv. Lors d'un essai entre l'usine et Strasbourg soit 7 km, la voiture a mis 3 mn. Il serait dans l'intérêt que la voiture gagne, parce qu'alors de nombreuses autres voitures seraient commandées.

Il s'agissait d'une voiture Dietrich Bugatti type 5 avec un 4 cylindres de 5,3 litres avec chemises en aluminium. Elle reçut le numéro de course 142 et aurait dû être pilotée par Ettore BUGATTI lui-même, avec à son bord son acolyte, le mécanicien Émile MATHIS. Mais la voiture n'a jamais pu prendre le départ, refusée par les organisateurs pour manque de champ de vision du conducteur.

Un peu plus-tôt, en mars de la même année, BUGATTI s'était rendu avec sa voiture à Vienne (à 900 km) pour participer à une exposition automobile. Le 31 août, ils termineront 3ᵉ, lors de la course du meeting de Francfort, derrière une Mercedes et une Bentz, et en septembre, de nouveau 3ᵉ derrière 2 Mercedes, à la course de côte de Sommering en Autriche. Au printemps 1903, Ettore BUGATTI n'était alors qu'âgé de 21 ans et Émile MATHIS n'avait qu'un an de plus !

Journal L'Auto d'octobre 1904

Atelier de modelage de l'usine SACM d'Illkirch Graffenstaden au 156 route de Lyon

1903, faits divers tragiques

Article du 23 septembre 1903 : le véhicule de Monsieur BUGATTI (Ettore BUGATTI était employé chez De Dietrich à Niederbronn) originaire de Milan, a tué un petit garçon entre Reichshoffen et Jägertal. Le Baron De DIETRICH qui avait croisé les 2 enfants de 4 et 6 ans, peu avant, et qui jouaient sur le bord de la route, avait essayé de prévenir les parents qui travaillaient non loin dans un pré. Malheureusement Monsieur BUGATTI qui n'a pu éviter la collision avec le garçon de 4 ans qui décéda sur place (Il s'agit vraisemblablement du petit Louis RUWELL. L'acte de décès a disparu !).

Le mois suivant, c'est la baronne De Dietrich qui fut éjectée de sa voiture sur la route entre Raon l'Etape à Lunéville. L'article semble suggérer que c'est la baronne qui conduisait et aurait tenté d'éviter un chien. Le Baron De Dietrich et le baron De Turckheim sont restés indemnes.

Janvier 1910

L'ancien directeur de la société allemande « Gasmotoren Fabrik » dans la ville de Deutz am Rhein près de Cologne, Monsieur BUGATTI, ancien premier ingénieur dans l'usine DIETRICH à Niederbronn, a construit au lieu appelé « Hardtmühl » à Molsheim une nouvelle usine où il construira des automobiles de course et des moteurs pour les dirigeables et les aéroplanes. Journellement arrivent des machines pour une valeur de 60 à 80 000 Mark. Il parait qu'il y aurait déjà des commandes en cours pour une année. Monsieur BUGATTI est détenteur de plusieurs brevets. Le nom BUGATTI est garant de la réussite du projet.

2 août 1911

Extrait du journal « Strasburger Neueste Nachricht » : « Victoire allemande : Lors de la dernière course dimanche dernier dans la Sarthe en France, la petite Bugatti de 5 cv, en lice pour le Grand Prix de France, sur une distance de 648 km, notre petite Bugatti s'est illustrée, opposée aux grandes voitures des plus grands constructeurs. Elle a terminé deuxième, pilotée par le chauffeur de Mr BUGATTI, Ernest FRIEDRICH, derrière une voiture Fiat de 170 cv pilotée par le recordman Victor HEMERY. Sur 14 voitures engagées, seules les deux voitures citées ont franchi la ligne d'arrivée. Cette prouesse de la voiture Bugatti est la preuve de sa fiabilité et la robustesse de la voiture alsacienne ».

1913

Démenti du journal Strasburger Neueste Nachricht du 31 mai 1913

L'usine automobile Ettore BUGATTI déclare que, suite aux rumeurs d'une annonce étrangère, qu'une délocalisation ou fusion avec une autre entreprise est erronée. L'entreprise, louée pour encore de nombreuses années, au lieu « la Hardtmühle Molsheim » continuera à exister afin que vous puissiez dans l'avenir, avec le petit pur sang de 5 cv Bugatti, continuer de rester invaincus :

  • Meeting de la Sarthe : 21 victoires, 103 km/h de moyenne sur le plat, 62 km/h de moyenne dans une pente de 7%
  • Course de côte de Limonest (commune près de Lyon) : 1ᵉʳ, FRIEDRICH sur Pur-sang Bugatti              

Il n'y a qu'une place qui convient ! Premier, toujours premier !

Source : Gallica

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Un peu d'histoire

De Valva à Valff, c’est tout d’abord un livre. A la fin des années 80, André VOEGEL et Rémy VOEGEL, Valffois et passionnés d'histoire, écrivent « De Valva à Valff » qui raconte l'histoire de la commune, petit village alsacien à proximité d'Obernai. L'ouvrage reprend, chapitre après chapitre, son histoire et celles de ses habitants. Dans les années 2010, Rémy VOEGEL complète la connaissance du village par divers textes édités dans le bulletin communal. 

Suite au décès d’André VOEGEL en février 2017, Rémy et Frédéric, son fils, se lance le défi de partager via le présent site les archives dématérialisées du livre, les vidéos de Charles SCHULTZ, sans oublier la publication des 40 classeurs historiques d’Antoine MULLER. Ces classeurs sont une mine d'or incroyable, car ils retracent en images toute l'histoire du village, de ses associations et de ses habitants.

Depuis, le devoir de mémoire de notre village alsacien se poursuit semaine après semaine.