- Écrit par : Rémy VOEGEL
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La Grande Guerre révolutionna le monde. Reclus dans leur village comme leurs ancêtres, n'ayant à peine visité les grandes villes et régions d'alentours, les habitants firent la connaissance d'un peuple inconnu. Des hongrois. Des quoi ? A peine certains savaient les situer sur une carte, voici que des hommes à la langue barbare et incompréhensible emménageaient parmi la population.
La guerre touche à sa fin, les troupes allemandes se replient en direction de l'Allemagne. Des contingents de soldats hongrois sont stationnés à Valff. D'un teint basané, d'origine gitane, ils n'inspirent pas confiance (c'est l'image qui restera dans la mémoire collective). Ils ont faim et dérobent tout ce qui leur tombe sous la main. Les fruits des arbres, le tabac à demi séché des séchoirs, les stocks dans les caves ... tout disparaît ! Les habitants ont peur. Ils se souviennent du cantonnement d'août 1914 et des 14 000 bavarois éparpillés dans le village et les environs. Au moins on pouvait communiquer avec eux ! Ils étaient reconnaissables à leur long poignard qu'ils rangeaient dans leur botte. Puis il y eu les troupes roumaines en février 1917. Maintenant le moral a changé. Le haut commandement allemand se désintéresse totalement du sort de ces hongrois. Les agriculteurs, eux, sont intrigués par leurs attelages tirés par des boeufs à très longues cornes, du jamais vu ! Une armée normale utilise des chevaux. Ils sont vraiment bizarres ...
Rue Principale au fond n° 254 et 256 entrée de la rue Meyer à gauche
Le 15 août 1918, un incendie détruit trois maisons dans la rue des Flaques. Un propriétaire avait stocké des cendres brûlantes dans un récipient en bois. Dans la nuit du 3 au 4 octobre se déclare un autre incendie dans le village, cette fois ci au niveau du n°208 de la rue Principale. Les hongrois cantonnés en masse sont évacués en toute hâte. Ils sauvent leur paquetage et le matériel militaire sur les prés aux abords du village. On déplore la destruction de 4 maisons d'habitations et 8 granges. L'incendie est tellement important que les pompiers de Strasbourg sont appelés à la rescousse. Certains bâtiments ne seront jamais reconstruits. On accuse à voie basse les militaires d'être à l'origine du sinistre ... Puis le bruit se répand : un soldat est mort électrocuté ! Les braises refroidies, les travaux de déblayages commencent. Les hommes qui nettoient restent figés : trois autres corps carbonisés apparaissent dans les décombres. Après avoir survécu aux pires batailles, ces pauvres soldats périrent surpris dans leur sommeil. Triste sort !
Le 16 novembre, l'armée française, venant d'Obernai, entre dans le village avec une formation de 16 cavaliers, clairon en tête. Dans le même temps, les soldats hongrois évacuent progressivement la commune. En signe de joie, ils décorent leurs uniformes de fleurs de chrysanthèmes volées sur les tombes du cimetière. Eux au moins sont restés en vie !
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