L'histoire des cimetières est inévitablement liée à celles des églises. L'église romane Saint Blaise ne faisait pas exception. Située dans l'enceinte du château, cette dernière accueillait les dépouilles mortelles. Une stèle encore visible à gauche du bâtiment témoigne de cette affectation, essentiellement réservée aux nobles du château.
Le cimetière de l'église Saint Blaise
Acte du registre de décès à Valff d'Antoine d'ANDLAU en date du 3 octobre 1731, fils de Jean Conrad d'ANDLAU originaire de Hombourg et de Marie Anne Josepha LIBERA, baronne de Reinach
Conjointement, le terrain autour de la chapelle Sainte Marguerite, au centre du village, était utilisé comme cimetière dès le XIVe siècle [en savoir plus : Le cimetière de Valff]. Le 20 avril 1603, Wolf et Friedrich d'ANDLAU confirment dans une charte que le cimetière de l'église Saint Blaise avait été désaffecté depuis près de deux siècles. En 1602, l'abbesse Madeleine VON REBSTOCK précise dans un courrier que le château et ses dépendances furent érigés il y a environ 50 ans sur l'emplacement de l'ancien cimetière et du presbytère. Lors de la construction de la nef de l'église Saint Blaise actuelle en 1740, le curé HAENNER préleva des ossements dans les travaux de fondations pour les ensevelir dans le cimetière de la chapelle Sainte Marguerite. Une ancienne carte de 1731 laisse entrevoir que le cimetière se situait sur l'arrière, côté Est, de l'église.
Le carré blanc dessiné dans l'enceinte du château, qui pourrait représenter une enceinte, semble situer l'ancien cimetière en 1731
Sur le côté Nord de l'église Saint Blaise est conservée une ancienne stèle marquée de l'année 1543, martelée vraisemblablement pendant la Révolution par le prêtre jureur Sébastien LASSIAT.
Acte de sépulture de Jean Conrad d'ANDLAU en date du 3 août 1726, assesseur de la région Basse Alsace, enterré dans l'église St Blaise de Valff
Le cimetière de la chapelle Sainte Marguerite
Le cimetière au centre du village débordait largement sur la route principale. Vers 1680, il fut clôturé d'un mur de 80 cm d'épaisseur dont quelques vestiges subsistent encore de nos jours du côté de la propriété JORDAN (Ouest). Lors des fouilles pour la mise en place du réseau d'assainissement, l'entreprise chargée des travaux a mis à jour, sur la route, des vestiges du mur d'enceinte du cimetière. Ce mur a disparu lors de la construction de la mairie en 1840 et le cours de la Kirneck a dû être légèrement dévié. Le cimetière entourait la chapelle Sainte Marguerite. Par un arrêté préfectoral de 1840, ce cimetière est déclaré par les autorités mal adapté et hygiéniquement défavorable. En 1846, la commune se propose d'acquérir la parcelle de vigne derrière la chapelle (côté Nord) appartenant à Xavier SCHERER. Mais pour une cause inconnue, la transaction ne se réalise pas. D'ailleurs, cette parcelle est restée enclavée entre le cimetière actuel et la chapelle Notre Dame jusqu'en 1986, date à laquelle l'achat se réalisa.
Plan de 1846 prévoyant la construction d'un mur (dessin en haut en rose) qui devait délimiter les limites après l'agrandissement du cimetière et l'acquisition de la parcelle de Paul SCHERER. On note qu'il existait un mur entre la mairie et la chapelle Sainte Marguerite et que l'on voit très bien la déviation de la Kirneck opérée après la construction de la mairie
Délibération du Conseil municipal du 20 octobre 1846 confirmant le désir d'agrandir le cimetière
Ce n'est qu'en 1848 que la commune décida l'acquisition de deux parcelles d'une contenance de 4 ares 42 centiares chacune, au prix de 450 frs la parcelle. Vendeur : François Joseph LUTZ et Célestin DIEHLMANN. Ces deux parcelles ne représentent que la moitié du cimetière et se trouvent au Nord en bordure du chemin d'exploitation. La commune cède d'ailleurs deux ares de terrain pour permettre l'agrandissement de ce chemin. Une lettre de l'Ingénieur en chef des ponts et chaussées du 13 septembre 1848 précise que le sentier dit Kirchgaessel sera maintenu pour communiquer avec le nouveau cimetière mais sera interdit à toute autre circulation. Il s'agit du sentier qui longe encore actuellement le cimetière. La même année, la commune fait construire un mur d'enceinte autour du nouveau cimetière pour un montant de 1200 frs. Les matériaux utilisés proviennent de l'ancien mur du château.
Plan de 1848 prévoyant l'alignement du chemin dit « Kirchgaessel » après l'achat des terrains de vignes au Nord à Célestin DIEHLMANN et François Joseph LUTZ. Entre l'ancien cimetière et les nouvelles parcelles acquises, il reste encore à acheter pour pouvoir agrandir le cimetière, les parcelles appartenant à Georges WERCK, Antoine LUTZ et Xavier SCHERER
En 1874, l'autorité de tutelle demande l'agrandissement du cimetière sur une surface globale de 30 ares. Après deux refus consécutifs du Conseil municipal prétextant que le nombre de décès annuel est en moyenne de 35 seulement et que les juifs sont enterrés de toute façon à Rosenwiller, il n'y a pas urgence pour l'agrandissement. Le projet est finalement accepté le 21 avril 1875. Les deux dernières parcelles (côté Sud) sont achetées à raison de 800 frs chacune (bien que nous soyons en période allemande, on compte toujours en francs). Vendeurs : Georges WERCK et Aloyse JORDAN. La commune ne pouvant faire face à cette dépense, décide l'adjudication de terrains communaux pour une somme de 1600 frs (décision du Conseil municipal du 21 avril 1875). Le mur d'enceinte fut complété et le cimetière présentait l'aspect tel que nous le connaissons actuellement.
D'ailleurs, le bon observateur pourra encore constater de nos jours que le mur a été édifié en deux étapes. Par la suppression d'une partie de l'ancien cimetière pour faire place à la construction de la mairie, beaucoup de monuments funéraires disparurent et trouvèrent place dans le mur d'enceinte. D'autres, par contre, sont bien conservés comme celui d'André SCHECK, curé de Valff pendant 43 ans, qui se trouve à côté de la chapelle Notre-Dame, et celui du curé LEYBACH devant la chapelle Sainte Marguerite. La grande croix à côté de Sainte Marguerite était la croix de l'ancien cimetière.
La croix émergeant au milieu du calvaire du cimetière actuel porte le millésime 1849. Cette date correspond à la première phase d'aménagement du cimetière. Des deux côtés du calvaire se trouvent sur un piédestal, les statues de la Sainte Vierge et de Saint Jean. Avant 1950, le calvaire était clôturé d'une grille en fer forgé. La mortalité infantile au moyen-âge était très grande. Aussi, avait on réservé une partie du cimetière pour enterrer uniquement les enfants. Même dans le nouveau cimetière, se trouvait tout de suite à l'entrée du cimetière, la partie réservée aux enfants.
Autre particularité, une certaine partie du cimetière était réservée à l'inhumation des enfants morts nés, non baptisés, des athées, ainsi que des personnes mortes par suicide. Ces morts n'avaient pas droit à l'assistance du prêtre au moment de l'enterrement. Aucun signe particulier, croix ou monuments funéraires ne marquait la sépulture. Une haie vive séparait cette partie (à la droite de l'entrée) du reste du cimetière. Vulgairement, les gens disaient que c'était le cimetière non béni (Ungeweihener Friedhof).
En mémoire de nos libérateurs
En novembre 1944, 14 soldats allemands trouvèrent la mort à Valff [en savoir plus : Enquête sur les derniers soldats allemands à Valff] et furent enterrés dans notre cimetière. Ils furent exhumés en 1958 et transférés dans le cimetière militaire de Niederbronn. Un jeune aspirant français trouva également la mort le 28 novembre 1944 à Valff (André Gilbert TÉRENZIO, 22 ans). Il fut également inhumé au cimetière, mais transféré plus tard dans sa terre natale. Une plaque commémorative a été fixée au mur du cimetière en mémoire de ces militaires [en savoir plus : Inauguration de la plaque souvenir en mémoire des soldats tombés à Valff].
L'actuel cimetière municipal a été aménagé pour accueillir un colombarium.
Crédit photos :
- Archives de la commune
- Fond Antoine MULLER