Au Tilleul, autre restaurant historique de la commune
De tous temps les auberges et bistrots ont été le théâtre de pugilats et autres échauffourées. Heureusement, la majorité d'entre elles se soldèrent avec par quelques yeux au beurre noir, des dents cassées ou des ressentiments tenaces. Ce qui est arrivé ce 2 octobre 1905 s'avéra plus fatal.
Restaurant « Zur Linde »
Extrait du journal « Oberehnheimer Anzeige ». A l'occasion du changement de propriétaire de l'auberge du Tilleul à Valff s'y est déroulé une violente bagarre. La cause de cette rixe d'après le correspondant du journal est une haine farouche et ancestrale que nourrissaient les familles KIENNERT et MULLER. Une sordide histoire d'appartenance politique ? La salle du restaurant, est, après le pugilat, un immense champ de bataille. Le mobilier détruit, des mares de sang coagulé, des habits déchirés, des traces éparses et des détritus amoncelés témoignent de la violence de l'attaque. Le médecin appelé en urgence mis près de quatre heures à rafistoler et recoudre les énergumènes. 9 personnes furent blessées sans parler de celles qui s'éclipsèrent de peur de se voir mêlées à l'affaire. La volonté préméditée de faire de la charpie est le fait que les auteurs avaient amené des serpettes et des couteaux. Malheureusement deux des protagonistes succombèrent à leur blessures.
Le victime s'appelle Xavier KIENNERT (25 ans), valet de ferme, né à Valff mais habitant à Hüttenheim (1). Il décéda le 9 octobre, ainsi, d'après le journal, qu'un certain MULLER (2). La famille MULLER était originaire de Niedernai. Les condamnations énoncées laissent à penser que c'est le clan MULLER qui aurait été à l'origine de la dispute.
« Oberehnheimer Anzeige », anciennement Courrier des Vosges
Extrait du journal « Oberehnheimer Anzeige » du 2 octobre 1904
Mais l'histoire aura des répercussions collatérales. Le 22 novembre 1905, des passants découvrent le corps d'une femme noyée à Obernai dans l'Ehnbach à 120 mètres de la voie ferrée. Sa tête est plongée dans 5 à 6 centimètres d'eau ce qui fit soupçonner un homicide. Les témoins semblaient reconnaître la femme, qui la veille à 11 heures, s'était présentée au tribunal d'Obernai. Le médecin appelé sur place reconnu en la quinquagénaire la femme d'André SCHNEE de Valff. La maison SCHNEE était voisine du restaurant. Le fils de cette dernière raconta qu'elle avait quitté la maison à 4 heures du matin. Elle venait de témoigner dans le fameux procès de la bagarre de Valff. Elle avait à l'époque lancée de graves accusations à l'encontre des auteurs et était choquée par la légèreté des condamnations énoncées (3). Les ragots, les rumeurs et les bavardages mais surtout les menaces de la famille MULLER l'avaient profondément troublé. Elle sombra dans une grave dépression. On conclu finalement au suicide.
Attestation de libération de Jean Baptiste MULLER en 1906
Nomination en 1902 du garde champêtre Jean Baptiste MULLER par le maire BIECHER
(1) : Auguste KIENNERT, le père de Xavier était journalier. Il était originaire d'Huttenheim, c'est pour cette raison que Xavier habitait ce village. Auguste, gardien de vaches avait épousé Thérèse BRUNEISSEN de Valff. Ils ont eu 8 enfants.
(2) : Le 12 janvier 1905, le tribunal de Saverne condamna le garde champêtre et cultivateur Jean Baptiste MULLER, époux de madeleine KEMPF et père de famille. Le juge décréta une peine d'emprisonnement de 1 an et 9 mois pour coups et blessures. Il sera libéré le 28 mai 1906. Barnabé MULLER, son père, écopa de 6 mois. Les MULLER n'était pas des tendres puisque Jean Baptiste avait déjà été condamné en mars de la même année pour port illicite d'un revolver. Les MULLER étaient originaires de Niedernai. Nous ne connaissons pas le prénom ni le lien de parenté du décédé. C'est vraisemblablement le fait qu'on ne pu clairement établir l'auteur du coup mortel qui poussa le tribunal à énoncer la sentence clémente.
(3) : Il n'est pas certain qu'un membre du clan MULLER ai vraiment succombé à ses blessures. Le seul susceptible à avoir participé est Florent le frère de Jean Baptiste. Il avait 20 ans à l'époque des faits. Il réapparaîtra dans les documents à Strasbourg en 1928. il est fort probable qu'il fut tellement blessé que la rumeur populaire l'avait déjà enterré. Le rédacteur du journal aurait simplement répété cette information. Nulle trace d'une personne du nom de MULLER décédée durant cette période n'est relatée dans les registres d'Etat-Civils. Le décès de KIENNERT à l'hôpital a été transmise à la mairie de Valff par le tribunal de Saverne.