- Écrit par : Rémy VOEGEL
- Affichages : 1624
Intérieur d'un magasin de fruits et légumes à la Krutenau dans les années 30
Petite devinette : savez-vous combien il existe d'espèces de pommes en Europe ? 500, 1000, plus ? de poires ? la réponse vous sera fournie à la fin de cet article.
Avec les différents remembrements, le nombre d'arbres fruitiers dans nos vergers n'a cessé de diminuer. Les vergers souvent plantés près des villages disparaissent laissant la place à des lotissements. La commune de Valff a voté en 1903 une délibération pour soutenir financièrement une toute nouvelle école : celle des arboriculteurs (Obstbaumschule) dotée d'une subvention de 40 Marks.
Le projet de cette demande de subvention était de planter dans le ban un verger modèle (Mustergarten). La commune se propose en plus de fournir les poteaux et toutes les choses nécessaires pour la réussite du verger. Tout était parti de la proposition du Kreisdirektor d'Erstein en 1886 de céder, pour toutes les communes du canton, un terrain proche des villages afin de promouvoir une association « d'Obstschüler ». Vu que les terrains communaux étaient tous loués, il fut décidé d'informer les locataires des sites choisis, du non-renouvellement de leur bail. Le projet était en route, mais… il faudra attendre encore dix-huit ans pour que le premier trou d'arbre soit creusé !
Délibération de 1903 sous la direction du Maire BIECHER de financer l'école d'arboriculteurs
Dans les citations populaires alsaciennes si créatives, il s'est propagé, à partir de cette période, un dicton cocasse : « Er esch e'd Baumschuel gange un als Pfonhl russ konmme » (Il est entré à l'école des arboriculteurs et en est revenu piquet). Pour les non-initiés de la subtilité de la langue alsacienne, un Pfonhl se dit d'un élève médiocre, limité et ignare. En français, on dit qu'un élève puni devait aller au piquet, c'est-à-dire rester debout au coin, immobile pendant un long moment. Donc, le tuteur de l'arbre était comparé au piquet du cancre, mais vous aviez suivi… n'est-ce-pas ?! Les cancres n'existent plus aujourd'hui... puisqu'il n'y a plus d'élèves au coin !
Marché de fruits et légumes de Colmar en 1933
Statistique du dénombrement des arbres fruitiers dans le ban de Valff en 1900 :
- 1921 pommiers
- 515 poiriers
- 993 pruniers
- 9642 quetschiers
- 46 mirabelliers
- 68 pêchers
- 391 noisetiers
Curieusement, on ne parle pas de noyers ni de cerisiers, un oubli ? Et le Nusseschnaps et le Kircheschnaps alors ? Combien d'arbres fruitiers pourrait-on dénombrer aujourd'hui ?
Vieux magasin de fruits et légumes à la Krutenau
Marché de Sélestat en 1933
Mais où se situait le verger communal de Valff ?
Les parcelles cerclées par le point en rouge appartiennent à la commune de Valff. C'est à cet endroit que se situait le verger communal. Le lieu est aujourd'hui une aire de repos.
Aire de repos en face du terrain de football
Dernier arbre fruitier survivant
Marché de Sélestat et Maison Stirnemann, grainèterie, fruits et légumes, en 1934
Marché d'Obernai
Marché de Barr
Réponse à la question posée en introduction :
On estime qu'en Europe, il existait près de 20 000 espèces de pommes, 3000 sortes de poires, 400 variétés de prunes, 40 espèces de mirabelles et 600 de cerises. Seule une dizaine de chaque espèce est aujourd'hui commune. La fameuse espèce de pomme Golden si courante aujourd'hui n'a vu le jour… qu'en 1890 et fut baptisée de ce nom en 1914.
En bonus : la recette de grand-mère Anna (XIXe siècle) : les pommes meriqûes (meringues)
« Éplucher puis couper deux pommes en deux, les mettre dans une poêle, ajouter du rhum et du sucre, laisser cuire puis les déposer sur une assiette. Napper les pommes cuites encadrées de trois macarons avec du blanc d'œuf et du sucre battu en neige. Après avoir nappé le tout avec la neige, saupoudrer de sucre. Passer tout ça au four tiède pour le dessécher. Servir frais ». Bon appétit !
Crédits photos :
- Archives de Strasbourg
- Fond BLUMER
- Recette d'Anna CROMER, 1893 (à retrouver de nos jours)