La Kirneck côté Nord de la rue Principale en 1925

Outre ses fonctions de PDG chez Heywang, André VOEGEL a également été premier adjoint au maire de Valff. L'occasion de revenir sur son rôle d'élu, mais également des décisions de la municipalité qui avaient conduit au comblement de la Kirneck dans la traversée du village.

Au mois de mars 1965, à l'âge de 40 ans, je suis rentré pour la première fois au conseil municipal de Valff. Déjà six années avant, j'ai raté mon entrée, il ne me manquait que quelques voix. La majorité des conseillers sortaient des rangs de l'agriculture comme d'ailleurs la majorité des votants. Rentré au conseil municipal sans être agriculteur pouvait être considéré à l'époque comme un exploit. Ces sentiments instinctifs n'étaient pas dépourvus d'intérêts et d'égoïsme, car le conseil fixe les impôts fonciers et vote les crédits d'entretien et de réfection de la voirie rurale et souvent au détriment d'autres travaux d'intérêt général. Pourtant, les temps et les mentalités commençaient à évoluer. Une mutation lente mais irréversible se mettait en place.

Vie publique

En ce qui me concerne, je devais faire face à un handicap supplémentaire de part ma situation professionnelle en tant que directeur d'entreprise. Cette situation n'était pas du goût de tout le monde. Nul n'est prophète en son pays. Je me rappelle d'un tract lancé à mon encontre le jour d'avant les élections, écrit en allemand « Wir haben schon ein Direktor, wir brauchen keinen Diktator » (nous avons déjà un directeur, nous n'avons pas besoin d'un dictateur). C'était un argument choc ayant impact dans l'opinion publique. J'ai malheureusement toujours constaté, que ce soit dans la vie publique ou professionnelle, que tous ceux qui ont profité le plus de mon aide et de mes interventions en leur faveur n'ont jamais été de fervents combattants pour ma cause, au contraire.

A cette époque, le conseil était largement divisé, le Maire en poste en difficulté de réélection comme Maire. Mme le Maire avait trouvé un subterfuge en accusant le premier adjoint, dans l'opposition, de l'avoir touché au cours d'un déplacement en voiture. La liste du Maire sortant, dont je faisais partie, obtint la majorité absolue par 7 conseillers sur 13. A la première séance du conseil, le 28 mars, je fus élu premier adjoint avec 7 voix sur 13, le maire sortant obtint le même score. Il fallait bien sûr se donner sa propre voix, ce qui n'est pas très élégant, mais nécessaire dans le cas précis. Toutefois, nous avions la probité de proposer le poste de deuxième adjoint à l'adjoint sortant qui fut élu avec 8 voix. Séance tenante, j'ai abandonné mes indemnités de fonction à son profit car je savais qu'il avait besoin de cette ressource. Ma largesse a été très mal récompensée par la suite, mais je n'ai jamais regretté ce geste.

Vers la canalisation tout à l'égout

Dès mon arrivée au conseil, les choses ont très vite évoluées, même avec le soutien de l'opposition. Elle s'est rendu compte de mon efficience et m'a toujours soutenu pour les décisions importantes. C'est d'ailleurs de cette façon que j'ai pu tirer le conseil plongé se sa léthargie chronique. Un autre facteur déterminant et dynamisant était la présence dans la commune depuis décembre 63, d'un curé hors du commun, Albert HOLTZMANN. Il avait le don de stimuler, d'encourager toutes les actions d'intérêt général sans toutefois s'immiscer dans les affaires. C'était un grand ministre du culte généreux, actif, audacieux même, qui exerçait sa fonction sacerdotale avec beaucoup de doigté, de dignité et très apprécié par ses ouailles. En l'espace de six années qui suivirent, la physionomie du village se transforma considérablement :

  • Mai 1965 : le conseil demande l'étude d'un projet d'ensemble d'une canalisation tout à l'égout à exécuter par tranches successives.
  • Mai 1965 : le chemin menant au vignoble dit Grasweg est aménagé, macadamisé sur une longueur de 520 m.
  • Juin 1965 : demande d'une étude d'un plateau d'évolution scolaire à la DDE. Le mur d'enceinte du jardin du presbytère est rasé, une très grande partie du jardin sera incorporée dans le plateau. La cour d'école exiguë au départ est notablement agrandie.
  • Juillet 65 : étude d'un dossier du premier lotissement de 9 lots en bordure du chemin Grasweg qui sera dénommé plus tard rue du Vignoble.
  • Mars 1966 : la DDA présente un devis pour l'assainissement tout à l'égout de la rue Principale représentant 105 branchements. Compte tenu de la pollution de la Kirneck qui traverse le village et qui dégage une odeur pestilentielle, nauséabonde, repoussante produite par les tanneries de Barr, le conseil décide la suppression du bras de la Kirneck passant dans le village. Les jolis ponts voûtés en moellons grès des Vosges donnant accès à chaque propriété doivent malheureusement disparaître. Les procès intentés par la commune depuis des décennies n'ont jamais abouti à faire disparaître la pollution. Une deuxième tranche est votée la même année et les travaux seront cumulés. Près de 2 km d'assainissement furent ainsi mis en place pour un montant de 606 395 frs. Valff, est la seule et unique commune avec un tel réseau d'assainissement. Les travaux durèrent jusqu'au deuxième semestre 1967.
  • Février 1968 : les travaux d'aménagement de la voirie, trottoirs font l'objet d'une adjudication pour 78 778 frs. A cette même séance, une demande d'extension du réseau d'assainissement fait l'objet d'une délibération pour la rue du Moulin, rue Thomas, rue Haute.
  • Juin 1968 : la commune signe un contrat d'exploitation d'une gravière avec l'entreprise HELMBACHER.
  • Août 1968 : nouvelles extensions du lotissement.
  • Novembre 1969 : demande d'extension du réseau tout à l'égout à la rue des Forgerons, rue Dauphin, rue de l'Eglise.
  • Décembre 1969 : le conseil approuve le remembrement du ban de Valff.

En février 1971, six années après mon élection, le village est pratiquement équipé d'un réseau d'assainissement, très en avance sur toutes les communes environnantes. Le village est beau, les trottoirs macadamisés, il est cité en exemple par les médias. Aux élections municipales de mars 1971, je reste simplement conseiller, l'entente cordiale avec le Maire était brisée, l'ancien adjoint redevient premier adjoint.

Un peu d'histoire

De Valva à Valff, c’est tout d’abord un livre. A la fin des années 80, André VOEGEL et Rémy VOEGEL, Valffois et passionnés d'histoire, écrivent « De Valva à Valff » qui raconte l'histoire de la commune, petit village alsacien à proximité d'Obernai. L'ouvrage reprend, chapitre après chapitre, son histoire et celles de ses habitants. Dans les années 2010, Rémy VOEGEL complète la connaissance du village par divers textes édités dans le bulletin communal. 

Suite au décès d’André VOEGEL en février 2017, Rémy et Frédéric, son fils, se lance le défi de partager via le présent site les archives dématérialisées du livre, les vidéos de Charles SCHULTZ, sans oublier la publication des 40 classeurs historiques d’Antoine MULLER. Ces classeurs sont une mine d'or incroyable, car ils retracent en images toute l'histoire du village, de ses associations et de ses habitants.

Depuis, le devoir de mémoire de notre village alsacien se poursuit semaine après semaine.