Une correspondance de cartes postales romantiques de 1913, écrite à l'attention d'un soldat alsacien assumant son obligation du service militaire dans l'armée allemande, intrigue. Rédigée par une certaine Catherine, la carte étonne. Explications.

La tableau est dressé d'entrée sur le dessus où sont imprimés les mots doux suivants : « Lorsque deux êtres s'aiment, il est écrit : ils sont un cœur, une pensée ».

La première carte postale est adressée en mars 1913 à Séraphin SPECHT résidant à Kneuttingen (Knutange en Moselle) dans la Wiesentrasse 33. Il a 20 ans et l'âge d'effectuer son service militaire. Comment il a atterrit dans ce petit village où il y est inconnu. Une poste restante ? La carte est rédigée par une personne inconnue, mais nous allons bientôt connaître son prénom grâce à une deuxième carte : il s'agit d'une femme prénommée Catherine. Elle écrit ces phrases courtes : « Je t'écris cette carte avec une certaine angoisse ... et pour finir te salues bien ... les retrouvailles sont si belles ! ». Enigmatique !

La première carte sera suivie d'une seconde du même imprimeur avec ces mots en couverture : « Je connais un coeur pour lequel je prie, et ce cœur me fait du bien ».

Cette deuxième carte est adressée par une certaine Catherine qui révèle son prénom en avril 1913 et est adressée à Séraphin SPECHT toujours installé à Kneuttingen. Le message de Catherine est le suivant : « Cher Séraphin. J'ai bien reçu ta carte et cela m'a beaucoup réjoui. Je vais bien, tout comme chez toi, je l'espère. Je me réjouie de te revoir bientôt. As-tu reçu ma première carte ? Je te salue et t'embrasse de tout coeur, ta très aimante Catherine. PS : réponse obligatoire ». 

Mais qui peut bien être cette Catherine ? Une fiancée ? Vu le thème des cartes on pourrait le supposer. Mais Séraphin a aussi une soeur, cadette de deux ans qui porte ce prénom. Quoi qu'il en soit, notre Séraphin est resté célibataire jusqu'à sa mort et pourtant il avait tellement fière allure dans son costume militaire !

Séraphin SPECHT en 1916. Au dos, il écrit à ses parents : « Comme vous pouvez le voir, j'ai beaucoup maigri »

Il écrira une carte le 4 juin 1916 de Elbling en Prusse (aujourd'hui Elbląg en Pologne) alors qu'il est Musketier au 148 Infanterie Régiment, 6e Compagnie. La Grande Guerre a compromis ses projets de retour au foyer. Si Catherine était sa bien aimée, a-t-elle perdu patience ? La sœur de Séraphin disparaitra des registres. D'après son carnet militaire, Séraphin est une fois appelé dans le service armé en 1921, mais cette fois ce sera dans l'armée française. Une jeunesse sacrifiée en somme !

Séraphin SPECHT est né dans une fratrie de 10 enfants d'Etienne et Marie Anne VOEGEL, dont 5 sont décédés avant leurs 20 ans. Avec ses deux frères, George et Joseph Aloyse, les trois célibataires habitaient jusqu'à leur mort au n°224 de la rue Principale. George et Joseph avaient une curieuse vision de la cohabitation, puisqu'il était de connaissance publique qu'ils avaient interdit à Séraphin de ramener une copine. Florent, le quatrième frère, était marié à Mulhouse. Le trio « des trois mousquetaires » était complété par la visite matinale à sept heures de leur soeur Thérèse, sans enfants, qui était mariée et habitait dans la rue Meyer. Elle était connue pour sa curiosité maladive et était surnommée dans le village « Les dernières nouvelles ». Une famille bien particulière !

La famille SPECHT

Carnet militaire de Séraphin SPECHT

Lors de la commémoration aux morts du 11 novembre 1934, on retrouve Séraphin au centre de photo en compagnie (de gauche à droite) de Joseph ROSFELDER (+ 1939), Eugène SCHULTZ (+ 1980), Emile ROSFELDER (+ 1989), Florent ROSFELDER (+ 1973), Albert HIRTZ (+ 1975), Aloyse MOSSER (+ 1961), Florent SAAS (+1967) et Joseph STUMPF (+ 1965). 

Photos, témoignages et remerciements à Laurent HASLAUER

Un peu d'histoire

De Valva à Valff, c’est tout d’abord un livre. A la fin des années 80, André VOEGEL et Rémy VOEGEL, Valffois et passionnés d'histoire, écrivent « De Valva à Valff » qui raconte l'histoire de la commune, petit village alsacien à proximité d'Obernai. L'ouvrage reprend, chapitre après chapitre, son histoire et celles de ses habitants. Dans les années 2010, Rémy VOEGEL complète la connaissance du village par divers textes édités dans le bulletin communal. 

Suite au décès d’André VOEGEL en février 2017, Rémy et Frédéric, son fils, se lance le défi de partager via le présent site les archives dématérialisées du livre, les vidéos de Charles SCHULTZ, sans oublier la publication des 40 classeurs historiques d’Antoine MULLER. Ces classeurs sont une mine d'or incroyable, car ils retracent en images toute l'histoire du village, de ses associations et de ses habitants.

Depuis, le devoir de mémoire de notre village alsacien se poursuit semaine après semaine.