Cabane de pêcheur sur l'Ill (1930)

Il fait chaud. Rien de tel qu'une bonne baignade. Les rivières étant souvent peu alimentées en été, l'affluent l'Ill qui passe à Sand est une aubaine tentante. Seulement voilà, encore faut-il prendre toutes les précautions ...

18 juillet 1842. Le maire de Sand BARTHELME est appelé en urgence au bord de l'Ill. Il s'y trouve un cadavre gisant au lieu dit Rottmatt aux abords du village. Il découvre un jeune homme couché sur sa face sur la rive de l'Ill, et près de lui, ses vêtements entassés. On retourne le cadavre. Il s'agit du jeune Antoine FRANCK de Valff, fils d'Etienne FRANCK, tisserand à Valff et de Marie Séraphine MULLER. Le père est informé chez lui que son fils se serait noyé à Sand. Il se met de suite en route en état de choc. Tout au long du chemin il se torture de ce qui l'attend. Arrivé sur les lieux, il reconnaîtra immédiatement son fils de 19 ans.

On fait appel à un médecin qui confirmera la noyade. Jacques Sébastien MAIRE, juge de paix de Benfeld enquêtera sur les circonstances du drame. Il convoquera le jeune Léger HIRTH qui fera le témoignage suivant : « Je m'appelle Léger HIRTH. Je suis domestique chez George HILD de Sand. J'ai 19 ans. Hier, vers 4 heures de l'après-midi, nous sommes partis, moi, mon frère Jean HILD et Antoine FRANCK en direction de l'Ill dans l'intention de nous baigner. Mon frère sauta le premier dans l'eau, puis ce fut mon tour. A une distance de 100 mètres, je vis Antoine sauter d'un coup dans la rivière. Lorsque je m'aperçu qu'il ne remontait pas des eaux, je me suis mis à nager dans sa direction de toutes mes forces. Une fois près de lui, il s'agrippa désespérément à moi comme ... "embrassé". Comme nous nous enfoncions tous les deux dans les flots, je criais à mon frère de m'aider. Je me débattis pour ne pas sombrer. Celui-ci chercha une petite embarcation et vint nous rejoindre. Mais il était trop tard ! Antoine m'avait lâché. Des secours étaient arrivés au bout d'une minute et ont tiré Antoine sur la berge. Mais il était déjà ... "un cadavre" ».

Constatant les circonstances malheureuses d'un accident le juge autorisa l'inhumation.

La famille FRANCK vivait dans la rue Basse aux numéros 262 et 263 de l'époque. Etienne, originaire de Benfeld, habitait la maison voisine de son fils aîné de 28 ans, François Joseph, tisserand comme son père, marié à Anastase DUBLING. Etienne, le père, et Marie Séraphine MULLER ont eu 10 enfants. Le 11 avril 1842, soit 3 mois avant la disparition par noyade d'Antoine, François Joseph, le fils aîné, décéda subitement laissant une veuve et deux orphelins : une fille et un garçon. Le garçon décédera à 12 ans ... la mère 4 ans après. Le sort s'acharne sur la famille FRANCK ! Déjà le frère d'Etienne était mort en 1811 à 20 ans ! La maison dans la rue Basse rappelle trop de souvenirs, impossible d'y rester. La famille déménagera au n°154 de la rue de l'Eglise ...

La vie n'avait jamais épargné la famille FRANCK. En 1842, sur les 10 enfants, ils avaient perdu une fille âgée de 9 ans, puis une autre fille âgée d'un an, un fils de 3 ans et un autre d'un an. Après la disparition de François Joseph et d'Antoine, ce fut au tour du plus jeune enfant, François Mathias de disparaître en 1846, soit 4 ans plus tard : il aurait eu 9 ans !

C'en est trop, direz vous ? Non, pas assez encore ! C'est une escadrille de mauvaises nouvelles qui s'abattirent sur la famille au début des ces années 40. En juin 1841, le maire de Valff reçoit un courrier en provenance du service des armées à Alger. L'administration communique que le sergent François Joseph MULLER, soldat dans la 3ème Compagnie du 2ème Bataillon du 3eème Régiment d'Infanterie Légère est décédé à l'hôpital de Miliana en Algérie après 20 jours des suites de fièvre. François Joseph était l'oncle maternel et le frère de Marie Séraphine, il avait 32 ans. Le frère d'Etienne père était déjà mort à 20 ans. Les malheurs en escadrilles !

Marie Séraphine MULLER s'éteindra à l'âge de 69 ans à Valff. Son mari Etienne lui survivra un peu. Il est décédera à Mulhouse.

Un peu d'histoire

De Valva à Valff, c’est tout d’abord un livre. A la fin des années 80, André VOEGEL et Rémy VOEGEL, Valffois et passionnés d'histoire, écrivent « De Valva à Valff » qui raconte l'histoire de la commune, petit village alsacien à proximité d'Obernai. L'ouvrage reprend, chapitre après chapitre, son histoire et celles de ses habitants. Dans les années 2010, Rémy VOEGEL complète la connaissance du village par divers textes édités dans le bulletin communal. 

Suite au décès d’André VOEGEL en février 2017, Rémy et Frédéric, son fils, se lance le défi de partager via le présent site les archives dématérialisées du livre, les vidéos de Charles SCHULTZ, sans oublier la publication des 40 classeurs historiques d’Antoine MULLER. Ces classeurs sont une mine d'or incroyable, car ils retracent en images toute l'histoire du village, de ses associations et de ses habitants.

Depuis, le devoir de mémoire de notre village alsacien se poursuit semaine après semaine.