« Oh Jésus, oh Jésus ! » se lamente l'inconnu en se tortillant de douleur. Joseph BODEMER de Valff en a eu pitié. Il l'a hébergé pour la nuit. BODEMER est un homme bon. Malgré un aspect de mendiant avec ses cheveux négligés, sa barbe noire, ses vêtements déchirés et son vieux chapeau sale, BODEMER lui a offert le gîte. Il n'a même pas pensé à se renseigner sur son nom !
- « De quelle maladie souffrez vous ? », lui demanda-t-il ?
- « Je ne sais pas. Je suis fiévreux depuis quatre ans », lui répondit son hôte entre deux rictus de douleurs
- « Vous n'êtes pas d'ici, je vois ! »
- « Je suis originaire du pays de Mayence », lui répondit l'inconnu
- « Vous êtes donc Luthérien, je vous conseille donc d'aller dans le village voisin appelé Bourgheim, ils sont de votre religion ! », lui proposa Joseph
Sans répondre une parole, l'homme consenti. Il se leva et la fille de BODEMER lui indiqua la direction.
Le lendemain, on retrouva un cadavre, dans le lieu appelé Litzelfeld, gisant dans un champs ensemencé de froment à la limite du ban de Valff. BODEMER reconnu son hôte de la veille. La dépouille fut transportée au village chez BODEMER où les autorités judiciaires postèrent une garde. Le même jour, les chirurgiens Jean Georges HOCKLINGER d'Andlau et Jean Georges DRELLER de Valff procédèrent à l'autopsie.
On ne releva aucune blessure sur le corps. Après avoir ouvert et découpé le sujet, ils jugèrent que les organes étaient en fort bon état et atteints d'aucune maladie. Leur verdict : le quidam est mort faute de nourriture suffisante et de pure misère !
Cet inconnu mourut seul, abandonné, dans la misère et la douleur. Il s'éteignit sur la terre glaciale de Valff, le 1er février 1746 et sa dépouille inhumée dans l'indifférence générale. Aujourd'hui, en vous émouvant de son histoire, vous commémorerez le souvenir d'un homme ... un peu moins inconnu !