Après les premiers articles chocs, l'heure est venue de faire le bilan. De temps en tant, des révélations poignantes alimentent encore certaines rubriques de journaux locaux. D'autres préoccupations intéressent maintenant les lecteurs. Les premiers signes d'une éventuelle guerre se font entrevoir. Malgré tout, nous avons relevé quelques informations stupéfiantes. Le lien de parenté entre une victime du naufrage et une famille de Valff en est Une. Revue de presse.
Les nouvelles révélations
Washington DODGE de San Francisco raconte que lui et sa femme voulaient tout juste aller se coucher lorsqu'ils entendirent un violent craquement. « Nous nous sommes transportés rapidement sur le pont où nous avons appris avec stupeur que le navire était entré en collision avec un iceberg. Lorsque nous comprirent que nous allions couler, la confusion fut extrême. Nous avons essayé de retourner dans notre cabine pour récupérer nos biens, mais l'affluence en contre-sens nous en a empêché. Nous avons été séparés dans différentes embarcations. Lorsque les lumières du Titanic s'éteignirent, un cœur de cris d'effrois se fit entendre. Parfois une voix s'arrêta puis d'autres reprirent. Pendant près de trois heures, c'était l'horreur, les cris de désespoir me hantent encore. Nous n'avions qu'une idée en tête, nous éloigner le plus loin possible de ces hurlements d'angoisses. Petit à petit, les appels cessèrent. Ce n'est que sur le Carpathia que mon mari et moi, nous, nous sommes retrouvés ».
Mme JOVSE, passagère sur le Carpathia raconte : « Lorsque nous sommes arrivés sur le lieu de la catastrophe, nous avons aperçu 18 canots et une barque. Nous avons recueilli toutes les personnes à bord. Sur la barque, 4 étaient décédées, nous les avons rejetées à la mer au retour. 35 personnes étaient agglutinées sur la barque. On a appris que 35 autres avaient essayé d'y grimper, mais furent rejetées par les vagues ou coulèrent par épuisement ».
Programmes des cinémas de Strasbourg en mai 1912
Mme DICK de Calgary au Canada raconte : « Nous fument réveillés par un grand choc. Nous nous sommes rendus sur le pont, où nous avons vu l'orchestre qui n'a cessé de jouer. D'abord des mélodies amusantes et légères, puis vers la fin, lorsque la fin fut arrivée, nous entendîmes au milieu des cris le cantique d'église "Nearer My God To Thee" (Plus près de toi mon Dieu). Nous sommes restés six heures dans le canot. Nous avions de l'eau et du pain, mais souffrions du froid ».
Le directeur de la White Star Bruce ISMAY a confirmé que l'une des embarcations s'était remplie d'officiers sur laquelle lui-même avait pris place. Il n'y avait à ce moment-là, d'après lui, plus aucune femme ni d'enfants sur le pont du Titanic. Auparavant, il avait offert aux passagers de 1ʳᵉ classe un repas de fête. Une des passagères avait glissé dans la poche de sa robe et a retrouvé le menu qui a été publié par un journal londonien.
L'Allemande Antoinette FLEGENHEIM de retour à Charlottenburg confia qu'elle a été réveillée par un grand bruit. Elle a sauté du lit, s'est habillée succinctement et a emporté quelques bijoux qu'elle avait caché sous son oreiller et s'est rendue sur le pont. Hors quelques hommes, elle ne vit pas grand monde. Ils la rassurèrent et lui conseillèrent d'aller se recoucher. Elle ne vit pas d'iceberg parce que la vapeur des chaudières avait enveloppé le pont. L'écrivain William STEAD lui conseilla de mettre rapidement un gilet de sauvetage. Les autres hommes se moquèrent de STEAD en le traitant de « Hasenfuss ». Madame FLEGENHEIM décida pourtant de retourner dans sa cabine pour se changer adéquatement et de récupérer ses autres bijoux qu'elle avait laissé dans le coffre du chef du trésor, bijoux d'une valeur de 80 000 Marks. Elle ne put néanmoins plus retourner dans sa cabine parce qu'une foule de passagers habillée avec des gilets de sauvetages a déboulé à sa rencontre. Le premier d'entre eux était le millionnaire ASTOR avec sa jeune épouse. Les hommes faisaient confiance au bateau et refusèrent d'embarquer dans les premiers canots qui ont été descendus sur le pont, il n'y avait pas de panique. Mme FLEGENHEIM monta dans le premier canot. Il n'était muni ni de compas, ni d'eau. Lorsque le Titanic coula, ses chaudières explosèrent au milieu des cris des désespérés. Dans son canot, tous les passagers priaient et les hommes se découvrirent la tête. Après sept heures d'angoisses, ils appareillèrent enfin près du Carpathia à huit heures du matin. Les rescapés, à moitié habillés, furent réconfortés avec un thé bien chaud.
Le journal le Petit Parisien signale le 1ᵉʳ août 1912 qu'une bouteille aurait été repêchée dans la région de Block Island dans laquelle était inséré un papier sur lequel on pouvait lire : « 16 avril. Nous sommes au milieu de la mer dans un canot. Nous n'avons ni nourriture ni eau. Major BUTT ».
Archibald BUTT était l'aide de camps du Président TAFT. Il n'a jamais quitté le navire. Au moment de la collision, il joue imperturbable au Bridge avec Clarence MOORE, Harry WIDEMER et William CARTER. À 0h45, le steward de salle les oblige à sortir du fumoir. Archibald BUTT monte alors sur le pont et aide, en compagnie de Francis MILLET, les femmes et les enfants à monter dans les embarcations. Les deux hommes disparaissent dans le naufrage. La dépouille de BUTT n'a jamais été identifiée.
Une victime aux origines alsaciennes
René Jacques LEVY
Le 20 janvier 2019, le journal Dernières Nouvelles d'Alsace relayait les recherches de généalogistes alsaciens qui se sont attardés sur la généalogie de René Jacques LEVY, une victime du naufrage. Sa mère est de Rixheim, ses grands-parents paternels, Baruch LEVY et Babette WEIL, sont originaires respectivement d'Odratzheim et de Wolfisheim.
Ce brillant chimiste nancéien, passager du Titantic, sera décoré à titre posthume à Cambridge pour avoir laissé sa place sur un canot à une passagère américaine d'origine suisse avec qui il s'était lié d'amitié.
René Jacques avec ses trois filles Andrée, Yvette et Simone
Des racines à Valff
Mais voilà ! Les noms de famille LEVY et WEIL sont des patronymes qui sont familiers dans notre village. De là, à essayer à connecter la famille de René Jacques aux lignées locales, la tentation est trop grande ! Pour simplifier, l'ancêtre de la lignée nous reliant au chimiste sont à chercher à Odratzheim, près de Marlenheim dans le Bas-Rhin.
Vivait dans ce village, Baruch, né en 1736 et marié à Fradel LEVY. Ils ont des enfants dont deux garçons : Nephtali, né en 1769, marié à Joséphine BILLA et Issac Lévy né en 1768 marié à Judith LEVY. Un fils de Nephtali s'appelle Baruch qui se marie avec Babette WEIL de Wolfisheim. Leur fils, Nephtali LEVY, est marchand d'Antiquité, et décède à Nancy. Son fils est René Jacques, notre passager du Titanic.
Le lien avec Valff
On reprend à partir de Baruch. Un de leur fils s'appelle Nephtali, qui deviendra l'ancêtre de René Jacques, victime du naufrage du Titanic et le deuxième Issac. Issac se mariera avec Judith LEVY. Ils auront un fils du nom de Simon né en 1808 qui se mariera avec Sara SCHUHL de Bischheim. Une de leurs filles s'appelle Adèle. Adèle naît à Bischheim et épouse Isaac Lévy de Valff le 21 février 1865. Elle décède à Benfeld en 1917. Le couple s'était auparavant installé à Valff où six de leurs enfants décèderont, d'ailleurs, en bas-âge.
Vous l'aurez compris, faire le tri dans les généalogies du patronyme LEVY est un sacré casse-tête. Et voilà comment notre village a un lien éloigné avec la catastrophe la plus médiatisée de ce début du XXᵉ siècle.
Vous avez pu vivre, avec cette série consacrée au naufrage du Titanic, les nouvelles qui ont passionné nos aïeux. Bientôt, une plus grande catastrophe éclipsera et accaparera les lecteurs assidus du village. La Première Guerre mondiale se prépare. C'est toute la civilisation, le calme et la sécurité qui vont bientôt vaciller et la vie d'avant va sombrer dans les profondeurs des abîmes !
Les autres parties :
- L'histoire du naufrage du Titanic vu par les lecteurs de Valff (Partie 1)
- L'histoire du naufrage du Titanic vu par les lecteurs de Valff (Partie 2)
- L'histoire du naufrage du Titanic vu par les lecteurs de Valff (Partie 3)
Sources :
- Gallica
- Généanet
- Wikipédia
- titanic.pagesperso-orange.fr