Fuite conjugale et tambours militaires : l’affaire Mathias HIRTZ, ou quand l’amour prend la poudre d’escampette

Le 13 janvier 1664, Mathias HIRTZ fait une entrée fracassante dans l’histoire de Valff… pour cause de sortie ! Radié du conseil communal (peut-être pour un excès de manque d’assiduité), il file ventre à terre vers Obernai, où il troque sa place de notable contre une hallebarde. Oui, monsieur HIRTZ s’engage comme soldat, sans autre forme de procès.

Jusque-là, rien d’extraordinaire : un homme quitte son poste et devient soldat pour survivre. Sauf que… Mathias s’était marié trois mois plus tôt à Valff ! Et le voilà qui s’évapore, sans même laisser un mot sur la table de la cuisine. Sa jeune épouse et ses beaux-parents FREYDER sont dans tous leurs états, entre pleurs, indignation, et peut-être un peu de rage contenue.

Inquiets de voir leur chère fille déjà veuve d’un vivant, ils en appellent à Alexandre d’ANDLAU, Seigneur du lieu, pour qu’il fasse pression sur les notables d'Obernai et fassent rentrer l’oiseau récalcitrant dans son nid. L’argument mis en avant de la jeune fille ? « Le beau gosse risque de se laisser séduire par une autre femme ! » Ce qui en dit long sur la confiance qu’ils ont dans leur gendre…

Alexandre d'Andlau, qui n’est pas sans humour (ou compassion), écrit donc au Schultheis d’Obernai, plaidant la cause du mariage brisé, patati, patata… au nom du bon voisinage, bien sûr ! Mais la réponse de Mathias, le 23 mai, est aussi tranchante qu’une baïonnette :
« Vous pouvez me tuer, je n’y retournerai pas ! »
Et toc.

Face à cet entêtement conjugal, nouvelle offensive des beaux-parents : « Sa femme est enceinte ! » avancent-ils. Réalité ou opération de manipulation affective ? Nul ne sait. Toujours est-il qu’ils sortent maintenant l’artillerie lourde : 10 Reichsthaler de rançon conjugale sont promis à la ville d’Obernai si elle libère (ou chasse) le fuyard.

La suite ? Mystère. A-t-il cédé à l’appel du devoir conjugal ? A-t-il fui jusqu’au bout du Saint-Empire romain germanique ? En tout cas, un Mathias HIRTZ est inscrit dans les registres de décès de Valff… en 1687. Le même ? Un autre ? Le doute plane.


Moralité ?
L’amour peut soulever des montagnes... surtout quand on y ajoute une poignée de Reichsthaler.
Et comme disait Pascal :

« L’amour a ses raisons que la raison ignore. »

Mais parfois, la raison du mâle s’enfuit à cheval... et où serait le mal ? 😇

Revient chéri ! N'abandonne pas, même si tu n'as pas encore découvert ma beauté intérieure… !👄

(1) Que pouvait-on acheter en 1650 avec 10 Reichsthaler ? 60 kg de viande ou 120 kg de pain ou encore 10 kg de tabac... ou 60 kg de viande de mari !

Un peu d'histoire

De Valva à Valff, c’est tout d’abord un livre. A la fin des années 80, André VOEGEL et Rémy VOEGEL, Valffois et passionnés d'histoire, écrivent « De Valva à Valff » qui raconte l'histoire de la commune, petit village alsacien à proximité d'Obernai. L'ouvrage reprend, chapitre après chapitre, son histoire et celles de ses habitants. Dans les années 2010, Rémy VOEGEL complète la connaissance du village par divers textes édités dans le bulletin communal. 

Suite au décès d’André VOEGEL en février 2017, Rémy et Frédéric, son fils, se lance le défi de partager via le présent site les archives dématérialisées du livre, les vidéos de Charles SCHULTZ, sans oublier la publication des 40 classeurs historiques d’Antoine MULLER. Ces classeurs sont une mine d'or incroyable, car ils retracent en images toute l'histoire du village, de ses associations et de ses habitants.

Depuis, le devoir de mémoire de notre village alsacien se poursuit semaine après semaine.