Lorsque des incendies se déclarent un peu partout, la peur du pyromane qui rôde se propage comme le feu. Dans les années 30, une angoisse justifiée a envahi les foyers du canton de Barr. Récit.
La région de Barr avait été plutôt paisible et calme jusque-là. Les médias ont commencé, au début des années 30, à relater de plus en plus de nouvelles d'incendies récurrents et inhabituels. Voyons les faits.
Stotzheim en 1909 (Fond BLUMER, archives de Strasbourg)
Stotzheim, le 12 novembre 1931
21h00. Les granges bondées de la récolte de l'été, situées au haut-village, propriétés du chef des pompiers et menuisier Charles KIEFFER, des agriculteurs Charles SANDLER et Charles SCHULTZ sont en feu ! Les colonnes de feu se dressent dans le ciel. Par bonheur, le vent est calme ce jour-là et ne transporte pas les flammes ardentes. Les pompiers locaux ne peuvent qu'éviter la propagation. Les animaux des alentours sont extraits des bâtiments. Les soldats du feu de Saint-Pierre et Zellwiller se joignent aux locaux. La pompe à moteur locale donne ce qu'elle peut, le feu semble se rire des quelques litres projetés. Les jeunes hommes volontaires sont exemplaires. Monsieur le Maire et sénateur, le comte d'ANDLAU ainsi que le curé BIBUS coordonnent les volontaires.
Stotzheim en 1909 (Fond BLUMER, archives de Strasbourg)
Ce n'est que vers minuit que le feu est maitrisé. Le lendemain, le triste spectacle de désolation est l'attraction des curieux. On déplore la perte de granges construites depuis peu, de quelques volailles et de machines agricoles. On le sait, au grand désespoir des sinistrés, la couverture d'assurance ne couvrira que modestement les dégâts. C'est la catastrophe financière pour les pauvres propriétaires.
La gendarmerie a ouvert une enquête : le feu a, paraît-il, pris dans les trois granges à la fois. Les causes resteront inconnues ... mais ce n'est qu'un début !
Westhouse, le 20 novembre 1931
Alors qu'il était en train de nourrir ses bêtes, que le jeune Charles KAYSER respire une odeur de brûlé. La grange de foin et de paille commençait à se consumer ! Grâce à la réaction rapide des secours, le feu pu être circoncis. Le reste du stock de foin et de paille fut transporté dans les prés voisins. On a évité le pire !
Westhouse en 1935 (Fond BLUMER, archives de Strasbourg)
Valff, 23 janvier 1932
Un feu s'est déclaré à 8h00 au restaurant « A la couronne » de la veuve George JOST au centre du village. Le feu s'est propagé si vite que les pompiers, malgré leur tout nouveau matériel, n'ont pas pu sauver le bâtiment. Les pompiers ont pu néanmoins sauver les maisons attenantes de Florent FREYDER et d'Eugène PFLEGER. Le bétail a pu être également sauvé, mais les animaux à plumes sont grillés. La cause de l'incendie semble accidentelle.
Westhouse, 4 avril 1932
Toujours à Westhouse, à deux heures du matin, c'est la ferme en face de l'église, du paysan Emile SCHEER qui part en fumée. 100 000 francs de dégât.
Stotzheim, 21 juillet 1932
À peine, la journée de travail était-elle achevée que la cloche « Sturmglocke » retentit. Partout dans le village résonnent les cris des hommes « Firio, Firio ! ». Ce ne seront pas moins de six corps de pompiers des alentours qui seront appelés en renfort : Zellwiller, Saint-Pierre, Nothalten, Eichhoffen, Epfig et Barr. Le déplacement dans le bas-village prendra du temps, mais le feu sera finalement circoncis. L'eau rare de la rivière Muhlbach proche a été précieuse pour remplir les seaux et alimenter les pompes. Malheureusement, les biens des familles SCHARWATT, WURY, BOHN, GAMB et ALLHEILIG sont partis en fumées : deux maisons d'habitations, quatre granges et séchoirs à tabac. Le feu aurait débuté dans la maison SCHARWATT qui était vide.
Château de Grunstein, Stotzheim (Fond BLUMER, archives de Strasbourg)
Zellwiller, 22 juillet 1932
Le lendemain de l'incendie de Stotzheim, c'est Zellwiller qui tremble ! « Firio ! Firio ! ». Les propriétés de Martin RISCH et Antoine KEMPFER sont en feu ! Sans raisons apparentes, le feu a pris dans la grange à bois. Trois granges et deux étables sont carbonisées. On déplore la perte de trois vaches, cinq cochons et un taureau. Au vu des récents incendies, la population est impatiente de connaître les résultats de l'enquête !
Zellwiller en 1909 (Fond BLUMER, archives de Strasbourg)
Benfeld, 26 juillet 1932
L'usine de fabrication d'ouate de M. Lucien BECHT est en feu. On estime à un demi-million de francs, le total des dégâts !
Benfeld en 1933 (Fond BLUMER, archives de Strasbourg)
Obernai, 27 février 1932
De mémoire d'Obernois, on n'avait pas vu de telles flammes ! Près de la gare, la scierie BUHR laisse échapper au ciel des colonnes rouges incandescentes. La nuit tombée démultiplie le spectacle grandiose. Le chef des pompiers GYSS s'affaire à coordonner le sauvetage de la ferme H. OHRESSER avoisinante. La cause du sinistre reste inconnue. Les dégâts se montent à 1 million de francs.
Obernai vers 1900 (Fond TONY, archives de Strasbourg)
Valff, mercredi après-midi, le 26 septembre 1934
Auguste ROSFELDER observe de sa fenêtre son voisin Eugène D. déjà condamné pour braconnage, mettre le feu entre le poulailler et l'écurie. ROSFELDER interpelle vivement Eugène qui prend la fuite ! L'agriculteur ROSFELDER voit de la fumée monter et cours sur la rue Principale pour appeler des secours. Pendant ce temps, le feu dévore sa grange, celle du pyromane et les bâtiments du boulanger Eugène MULLER. La pompe à moteur et la pompe à main des forces des pompiers est limitée malgré la proximité de la rivière qui était encore, il y a peu à sec suite à la canicule de l'été. L'incendie gagne du terrain et attaque maintenant les dépendances d'Ernest SPECHT et de sa sœur. Les pompiers de Bourgheim, de Zellwiller et de Goxwiller sont appelés en renfort. Après deux heures, le feu est maîtrisé. Quatre granges avec leur réserve de foin ne sont plus qu'un tas de cendres. Le tabac qui séchait dans le séchoir de Joseph LUTZ contigu à la grange de ROSFELDER est perdu. On estime l'ensemble des dégâts à 300 000 francs. La mère et l'épouse du pyromane se trouvaient, à l'heure de l'incendie, chez un médecin à Strasbourg. Ses deux petits enfants qui jouaient dans la grange sont indemnes. Eugène D. est arrêté peu après par la gendarmerie d'Obernai en état d'ébriété.
Barr, mercredi 31 octobre 1934
La tannerie Ernest DIETZ située dans la vallée brûle. Vers deux heures du matin, des voisins, occupés à distiller du Schnaps, aperçoivent des lueurs rougeâtres provenant du deuxième étage de l'usine. Le propriétaire et les pompiers sont alertés. Les réserves d'huiles et de colorants sont un réservoir de choix pour le feu. La grande échelle Magirus et tout le matériel nécessaire sont réquisitionnés sous le commandement de Jules MEON et d'Edouard HERRING et huit lances à incendie sont en action. Monsieur DIETZ et ses fils se sont jetés dans les hangars pour essayer, en vain, de sauver quelque chose. Seuls quelques papiers, livres de comptes et documents ont pu être préservés. Vers le matin seulement, le feu a pu être maîtrisé, un pan de mur s'est effondré à 11 heures menaçant d'ensevelir trois pompiers dont un a été blessé. Les dégâts sont estimés à 2 millions de francs. L'usine est totalement détruite.
Pour plus d'information https://www.barr-memoire.com/les-grands-incendies
Benfeld, 27 novembre 1934
L'usine de fabrication BECHT, d'ouate de coton et de laine, située sur la route de Westhouse qui avait déjà été la proie des flammes en juillet 1932 est de nouveau en feu ! Cette fois, ce sont les bâtiments de blanchisserie et d'empaquetage qui sont une proie facile. Les bâtiments n'étaient pas assurés. Les 20 ouvriers des locaux brûlés seront réemployés dans un autre secteur de l'usine. C'est grâce à la nouvelle installation d'arrivée d'eau récemment installée que la catastrophe a pu être maîtrisée.
En mai 1937, nouvel incendie chez BECHT. Cette fois, il semblerait que c'est la foudre qui en serait la cause. Ce n'est vraiment pas de chance !
Source : Gallica
Crédit photos : Archives de Strasbourg
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