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Johann Peter SILBERT. Né à Colmar en 1778, mort à Hietzing en Basse-Autriche le 12 décembre 1844. Écrivain, poète, traducteur et enseignant : voilà en quelques mots la biographie du fils d'Anna Maria Joséphine JESSLER de Valff dont nous avons retracé la vie et la conversion (à lire : Le baptême sensation de Maria Anna Joséphine JESSLER).

Dans notre dernier article, nous avons laissé notre petite famille SILBERT dans la région du Palatinat allemand à Schöneberg près de Bingen, après les affres de la Révolution française. Ils y éliront domicile jusqu'en 1792. L'arrivée ne se présente pas sous de bons auspices. Le petit frère de Jean-Pierre, Alexandre, âgé de 6 ans meurt en 1789 à RASTATT. Dans l'acte, la mère a pour prénom Josephae. Le jeune Jean-Pierre y fréquentera l'école publique. Adulte, il étudie à Mayence et fréquente la congrégation des jésuites. Il écrira plus-tard : « Durant cette époque, je n'ai rien appris d'autre que la grammaire ». Mayence est la proie de la politique guerrière française. La ville est rattrapée par les soubresauts de la Révolution. Elle sera le théâtre de prises et pertes successives par l'armée française. Les temps sont chaotiques. SILBERT ballotté par ces jeux politiques errera sans but quelques années. Dépité, il s'engage, comme son père, pour trois ans, dans l'armée. C'est dans les troupes du Prince Louis V Joseph de BOURBON CONDE qu'il gravira les échelons. Ce dernier s'opposera aux révolutionnaires et combattra à Wissembourg et Haguenau. Les connaissances du français et de l'allemand ont dû servir Silbert.

SILBERT écrira en 1834 à son ami BENKERT les paroles suivantes : « Du temps où Charles X était encore sur le trône, un ami a eu l'idée de vouloir : "mich zum Lebkuchen Ritter bachen" (textuellement : me cuire en chevalier de pain d'épices) et m'accrocher la croix de la Légion d'Honneur. J'ai donc été invité à un grand dîner ministériel où était présent, entre-autre, le Duc de Montmorency qui connaissait ma vie et qui savait que j'avais servi pendant trois ans en tant qu'officier dans l'armée de Condé. La chose m'a paru tellement stupide que je me suis laissé excuser et ne me suis même pas présenté à ce dîner ; ce n'était pas ma place ! »

Était-ce suite à la prise de pouvoir des révolutionnaires que la famille avait quitté la France ? Était-ce le pillage des biens de l'Église qui motiva Jean-Pierre fils à rejoindre les Royalistes et combattre les révolutionnaires de l'Armée du Rhin ?  La paix revenue et de nombreuses années encore, SILBERT ne trouvera pas sa voie. Il s'instruit au noviciat chez les jésuites dans un cloître à ROME pendant deux ans. Il écrira : « Je n'étais pas fait pour devenir curé, je me suis senti plus utile en tant qu'écrivain ».

Jean-Pierre a la bougeotte. Il s'installe en 1817 à Siebenbürgen en Autriche après un bref passage en Roumanie à Cluj-Napoja et Kronstadt en Transylvanie. Puis, il s'installe à Vienne. Il y exerce la fonction de professeur d'art, de dessin. Pour arrondir ses fins de mois, il met ses compétences au service de l'entreprise d'export Reicha et Cie dans la ville protestante de Kronstadt en Autriche. Il enseignera aussi, plus tard, à l'École Polytechnique de Vienne. Il y enseignera la littérature et la langue française aux jeunes nobles de l’aristocratie viennoise. En 1835, il prend la décision de démissionner et de se consacrer exclusivement à l'écriture religieuse, vraisemblablement sous l'influence d'un de ses amis, André RAESS originaire de Sigolsheim et futur évêque de Strasbourg.

L'influence spirituelle de sa mère juive convertie, originaire de Valff (1), a sûrement aussi modelé la foi de Johann Peter. Juive de naissance, elle aussi était en quête d'une direction spirituelle.

Jean-Pierre se mariera avec Ottilia DEABUS en 1807. Ses témoins sont un certain Antonius POLTZ mais aussi un aristocrate, Ladislas FODOR de Türe. Il y est appelé le "Gallus" (gaulois ?) et servit de précepteur dans les familles nobles d’émigrants français. Jean-Pierre engendra 3 enfants : Barbara Philippine née en 1809, Joseph qui sera consacré prêtre né en 1811 et Antonia qui décéda en bas-âge. Avec l'aide de sa fille Barbara Philippine qui restera célibataire, il se fixera la mission de traduire du français des textes ascétiques (2), des hymnes et des cantiques religieux et rédigeront des poésies, des poèmes et des écrits. On dénombre pas moins d'une centaine de livres qu'il fera paraître durant sa carrière. Il soumettra à l'Empereur d'Autriche François II l'autorisation de publier un dictionnaire en deux volumes en langue française. En 1815, en lice contre 24 autres prétendants, il est officiellement nommé par l'Empereur, traducteur et enseignant de la langue française à l'académie Sainte-Anne de Vienne avec un salaire de 500 Gulden. Certaines de ses œuvres sont encore éditées de nos jours.

Johann Peter SILBERT, malade, s'éteindra en 1844 à Hietzing en Autriche. Il est enterré au cimetière de Matzleindorf Atzgersdorf près de Vienne. Des poèmes comme "Himmelsfuncken" ou "Abendbilder" seront interprétés et mis en musique du vivant de SILBERT par le grand compositeur Franz SCHUBERT (1797-1828).

Il publia aussi " Beitrag zur Wiener Katholischer Romantik". Il fut considéré par ses pairs comme étant " l'auteur de chants d'une culture théologique exceptionnelle et auteur d'une littérature foisonnante et brillante ". 

Johann Peter SILBERT, un personnage illustre et méconnu dont les origines remontent à notre village Valff.

(1) Voir l'article : Le baptême sensation de Maria Anna Joséphine JESSLER

(2) Ascétisme : Se dit d'une discipline volontaire du corps et de l'esprit cherchant la perfection par une forme de renoncement et d'abnégation.

Sources :