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Il y a 75 ans jour pour jour, le 25 août 1942, alors que l'Alsace est annexée de fait par l'Allemagne nazie, le Gauleiter WAGNER publie un décret introduisant le service militaire obligatoire pour tous les alsaciens.

L'incorporation de force

Depuis le début de l'année 1942, les jeunes alsaciens étaient déjà soumis au RAD (Reichsarbeitsdienst, 6 mois de travail mais aussi de formation para-militaire). Le Gauleiter WAGNER avait promis à Hitler 200 000 recrues (l'équivalent de 10 divisions) pour compenser les lourdes pertes sur le front de l'Est. Le 11 février 1943, devant le nombre croissant de réfractaires alsaciens, le Gauleiter publie la « Sippenhaftgesezt » (loi de responsabilité collective) : la non-présentation aux conseils de révisions est punie d'emprisonnement au camp de Schirmeck. Le 1er octobre 1943, c'est les représailles contre les familles (menace de déportation) qui est inscrit dans la loi. Les alsaciens n'ont plus le choix, ils doivent servir : ce sont les « Malgré-Nous » [En savoir plus ICI].

100 000 alsaciens (21 classes d'âges), 30 000 mosellans (14 classes d'âges), 10 000 luxembourgeois (7 classes d'âges) sont mobilisés de force dans la Wehrmacht (Luftwaffe, Heer, Kriegsmarine et la Waffen SS). A la fin de la guerre, on dénombre 40 000 morts ou disparus (1 sur 3,5) dont une majorité dans les camps de prisonniers de l'Union soviétique. S'y ajoutent l'incorporation d'adolescents à partir du janvier 1943 en tant que servants de pièces d'artillerie anti-aérienne, mais aussi de femmes, pour servir d'auxiliaires de l'armée ou employés par l'état, ce sont les « Malgré-Elles ».

Le mémorial du canton

La croix du souvenir de l'ADEIF est érigée sur le « Mont National » à Obernai à partir de 1955, en souvenir de tous les Malgré-Nous non rentrés du canton. Le mémorial est définitivement inauguré le 18 novembre 1956. Le blason de Valff y figure, en hommage à tous les non-rentrés du village. Le 12 septembre 1965, l'abbé Hoffarth organise au Mont National à Obernai le premier grand rassemblement des anciens de Tambov et de leurs familles. Depuis, chaque 25 août ont lieu à Obernai les commémorations du souvenir.

Obernai sera pourtant la seule ville à ériger un tel monument. Histoire honteuse, polémique (le procès de Bordeaux a eu lieu en 1953), il faudra attendre des décennies avant que d'autres villages réalisent à leur tour de petits monuments ou simplement des plaques du souvenir.

Le recueil des disparus

Le 13 mai 1945, est créée à Mulhouse de l'ADEIF : Association des Déportés et Incorporés de Force. Son premier grand travail d'après-guerre sera la recherche des disparus. Un long travail de recherche débute, toujours inachevé en 2017. L'ADEIF publie en association avec la région Alsace dès 1946 « le recueil photographique des disparus du Bas-Rhin, victimes de la conscription allemande de 1942 à 1945 ». L'idée était que les vagues d'alsaciens de retour de captivité en URSS s'y plongent, afin d'aider à identifier des camarades et d'informer les familles sur leur sort. Malheureusement, très peu des disparus vont rentrer. On y retrouve quelques Valffois :

Le 13 avril 1955, Jean-Jacques REMETTER rentre chez lui, donnant un nouvel espoir à beaucoup de familles et apportant le témoignage qu'il y a encore des alsaciens détenus en Union soviétique. Ce sera le dernier à rentrer, 10 ans après la fin de la seconde guerre mondiale.

Les Malgré-Nous qui ne non jamais rentrés à Valff

Parmi les victimes de Valff, nous retrouvons :

Beaucoup ont été portés disparus, quelque part en Union soviétique, souvent dans des conditions confuses, laissant leur famille dans l'attente, sans information, sans pension. On espère un retour, on espère qu'il vit quelque part en Union soviétique. Dans l'après guerre, voyantes et diseur de bonaventure font recettes en laissant croire aux familles que leurs proches sont encore en vie.

Mais les années passant, les familles se rendent à l'évidence qu'il n'y aura plus de retour. Un long combat administratif débute alors. De 1950 à 1962, le maire HALMENSCHLAGER mènera à Valff un important combat judiciaire, pour traiter individuellement chaque dossier d'incorporé de force : qu'un acte de décès soit attribué par jugement à chaque disparu, pour que la famille puisse au moins faire deuil de leur proche, mais aussi et surtout, que la mention « Mort pour la France » soit attribuée à chaque incorporé de force, ouvrant notamment droit à des pensions aux veuves.

À l’occasion du 65e anniversaire de la victoire de 1945, Nicolas Sarkozy, président de la République, reconnaît officiellement les Malgré-Nous comme des victimes du nazisme.

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