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Jean LEBHERTZ. Ce nom vous est probablement inconnu. Ce jeune homme de 29 ans naquit à Valff le 28 octobre 1826. Peut-être n'a t-il jamais connu l'amour, n'a t-il pas même eu le temps d'envisager de fonder un foyer. A-t-il même osé un jour embrasser une fille ?  Il s'éteindra, comme beaucoup de ses jeunes camarades pendant son service militaire.

Faisons un rapide état des lieux de la longue liste des pertes militaires valffoises durant la première moitié du XIXe siècle :

Une longue, très longue liste d'enfants de Valff. Revenons à l'histoire et à la vie de Jean LEBHERTZ.

Il est le fils de Jean LEBHERTZ de Bischoffsheim et de Julienne BIRGEL de Valff. Les Lebhertz sont pauvres. Le père, journalier, essaie de joindre les deux bouts comme il peut. Ils habitent au milieu du village, dans la rue Principale. Jean est l'aîné suivi de François Antoine qui meurt rapidement. On appellera le garçon suivant du même prénom et sa petite sœur portera le prénom Anne Marie. Elle ne survivra pas non plus. La vie à Valff est trop rude, la famille déménagera du village. Plus tard, notre Jean, le fils, s'engagera au 12e Régiment d'artillerie. Il est rapidement promu brigadier. Et la guerre de Crimée éclate.

Comme beaucoup de soldats en Crimée, le sous-officier Lebhertz contractera le choléra. La maladie ne s'arrête pas au grade. Il sera transféré à bord d'une ambulance de campagne. Mais il est trop tard, comme beaucoup, il ne survivra pas. Matricule 4346 rejoindra les autres corps morts dans cette terre amendée par les cadavres. Le nombre des morts français s'élèvera à 95 000. Le nombre de tués dans les batailles à 20 000. 75 000 morts de maladies. Drôle de guerre!

L'administration militaire et politique

Comme nous avons pu le constater, de tous temps, les pertes des suites de maladies ont été élevé. Durant la guerre de Crimée, la correspondance des instances médicales est édifiante. Les troupes furent frappées par une épidémie de choléra en 1854 et de typhus en 1855. Le médecin en chef SCRIVE demanda aux autorités militaires françaises la création d'un hôpital à Smyrne, l'intendance refuse ...  alors que les Anglais adoptent l'idée à leur compte. L'inspecteur du service de santé Michel LEVY demande la transformation de deux navires en hôpitaux flottants, l'intendance refuse ... et une nouvelle fois les Anglais adoptent l'idée pour leur compte. Les Anglais, pris de pitié, proposeront même de soigner et nourrir nos soldats malades. Les Français ... refusent. Pourtant, les grands décideurs politiques et militaires se laisseront bien traiter et bien soigner,  loin du front si possible ... eux !

Imaginons un instant des centaines de malades du choléra empilés les uns sur les autres se vider de leurs boyaux des diarrhée par jets comme de l'eau (par pudeur on s'est retenu de vous mettre des photos !).

Constantinople, 12 juillet 1854

« Que votre Excellence me permette cet aveu, je suis effrayé de la fixation de deux mille cent malades pour l'hôpital de Pera. Le bel édifice ... ne sera bientôt plus qu'un foyer d'infection. Cinq cent à six cent malades par hôpital, tel est le chiffre que l'expérience autorise », Michel LEVY.

Constantinople, le 29 novembre 1854

« Depuis que l'hôpital de Pera compte plus de douze cents malades, l'infection purulente s'y multiplie chez les malades. L'hôpital de Douad Pacha compte mille deux cents lits de malades au premier étage, son rez-de-chaussée loge mille cinq cents soldats convalescents, sa cour est encombrée de tentes abris qu'habitent d'autres militaires sortis de convalescence ... la suite édifiera Votre Excellence sur les résultats de cette expérience ! », Michel LEVY.

Constantinople, le 3 mars 1856

« La contagion continue ses progrès. Des cinq mille places que je demandais, j'en ai obtenu mille. Il a fallu rapprocher les lits ... le mal s'accroît », BAUDENS.

Constantinople, le 20 novembre 1854

« Monsieur le Maréchal, ministre de la guerre. L'épuisement de ma santé par cinq mois de lutte au milieu des circonstances les plus pénibles et les plus critiques me fait désirer que votre Excellence veuille bien mettre un terme à ma mission », Michel LEVY. Les hommes de troupes et les officiers ne font, et ne ferons pas plus, plus tard, partie du même monde. Les familles des victimes apprécièrent. On les priva de leur enfant, à la place, on leur laissera la consolation ... de pouvoir pleurer !

« Il est difficile d'entendre un souffle de compassion quand il est couvert par les cris de haine », Alain LEBLAY

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